Histoire du Soudan

Dossier TASS. Le 1er janvier, le Soudan fête le 69e anniversaire de son indépendance. TASS a préparé un dossier sur l’histoire du pays.

Époque précoloniale

Au IIIe millénaire avant notre ère, la partie nord du Soudan contemporain située dans la vallée du Nil et connue sous le nom de Nubie était peuplée de tribus sémites, hamites et couchitiques proches des Égyptiens. Jusqu’au VIIIe siècle avant notre ère, ces territoires subissaient une influence importante de l’Égypte. Entre le IIIe et le VIe siècles, y ont été fondés les royaumes de Nobatie, d’Alodie et de Makurie (le dernier a pris fin en 1560). Au VIe siècle, ces territoires se sont convertis au christianisme. Cependant à partir du VIIe siècle, le nord et le centre du Soudan ont commencé à se peupler de tribus arabes et la population de ces régions a été islamisée.

Époque coloniale

Entre 1819 et 1822, une grande partie du Soudan contemporain a été occupée par les Égyptiens. Puisque l’Égypte faisait partie de l’Empire ottoman, ces terres ont été incorporées dans l’État turc alors que de facto, elles restaient sous contrôle égyptien. La ville de Khartoum fondée en 1822 a été déclarée capitale.

Suite à l’occupation de l’Égypte par le Royaume-Uni en 1882, ces pays ont signé en 1899 un accord sur la gestion commune du territoire soudanais qui a été nommé Soudan anglo-égyptien tout en restant une colonie britannique. Souhaitant limiter l’influence musulmane et arabe, les autorités coloniales ont instauré une administration différente pour le Nord et le Sud tout en imposant la religion chrétienne dans le Sud. Ainsi le territoire soudanais a été scindé en deux: le Nord, arabo-musulman, et le Sud, africain et chrétien.

En 1922, le Royaume-Uni a reconnu l’indépendance de l’Égypte, le roi Fouad Ier a été déclaré roi de l’Égypte et du Soudan. Cependant, les Anglais ont gardé leur position dominante sur ces territoires jusqu’en 1952, l’année où un coup d’État a eu lieu en Égypte et où la monarchie a été abolie. En tenant compte des tendances anticolonialistes, en 1953, Londres et Le Caire ont signé un accord en accordant aux Soudanais le droit à l’autodétermination, la formation des organes législatifs et exécutifs. En trois ans, les troupes britanniques et égyptiennes se sont retirées de ce territoire. En 1955, le parlement soudanais a adopté une déclaration sur l’indépendance du pays. Le 1er janvier 1956, la République du Soudan a été proclamée.

Après l’indépendance

C’est le Conseil souverain présidé par Abdel Al-Maghrabi qui a été proclamé principal organe dirigeant du pays. La promesse a été donnée à la population chrétienne du Sud de créer un système fédéral. Après l’abandon de ce projet, une rébellion armée a éclaté dans le Sud qui s’est transformée par la suite en une guerre civile. Le conflit entre le Nord et le Sud a provoqué une situation économique difficile et a paralysé l’activité des organes d’État.

Un coup d’État militaire a été orchestré au Soudan le 17 novembre 1958. Le pouvoir a été pris par le Conseil suprême des forces armées dirigé par le maréchal Ibrahim Abboud qui s’est proclamé président du Soudan. La promesse de rendre le pouvoir à un gouvernement civil n’a pas été tenue. Tout cela a eu pour effet la naissance d’une nouvelle vague d’émeutes et de grèves qui a amené à la transmission du pouvoir à un gouvernement provisoire en 1964. Entre 1965 et 1969, les désaccords entre les différents partis ont compliqué l’adoption d’une Constitution permanente et la résolution des problèmes économiques, ethniques et confessionnels existant dans le pays.

Soudan à l’époque de Gaafar Nimeiry entre 1969 et 1985

L’incapacité des principales forces politiques de parvenir à un compromis a entraîné le deuxième coup d’État orchestré le 25 mai 1969. Il a été dirigé par le colonel Gaafar Nimeiry qui deviendra président du Conseil national du commandement révolutionnaire et premier ministre soudanais. Les communistes et les représentants des forces de gauche sont entrés dans le nouveau gouvernement. En 1971, suite à la tentative des communistes de destituer Gaafar Nimeiry, leurs représentants ont dû quitter le gouvernement. Les organisateurs et les participants du putsch ont été exécutés. La même année, Gaafar Nimeiry a été élu président. En 1972, son gouvernement a signé un accord avec les régions du Sud (accords d’Addis-Abeba) qui a mis fin à la guerre civile entre le Nord et le Sud qui aura duré plus de 15 ans. Le Sud a pu bénéficier d’une autonomie.

Dans les années 1980, la politique de Gaafar Nimeiry a subi des changements en raison de la croissance de l’influence des islamistes au Soudan. Le socialisme arabe a été remplacé par la politique de l’islamisation. En 1983, le Soudan a été proclamé République islamique. L’introduction de la charia dans les provinces du Sud et la tentative de priver d’autonomie les régions où des réserves de pétrole ont été découvertes ont amené à une deuxième guerre civile. Le 6 avril 1985, Gaafar Nimeiry a été destitué par un groupe d’officier sous la houlette du général Abdel Rahman Suwar al-Dahab.

Période entre 1985 et 1989

Un conseil militaire provisoire et un gouvernement provisoire ont été créés. Des élections démocratiques ont été organisées au Soudan en 1986. Elles ont été remportées par le parti islamique Oumma. Ahmed al-Mirghani a été élu président. Or la situation économique difficile et l’incapacité du gouvernement à mettre fin à la guerre civile contre le Sud a suscité du mécontentement dans les cercles militaires.

Soudan à l’époque d’Omar el-Bechir entre 1989 et 2019

Le 30 juin 1989, les militaires ont effectué un nouveau coup d’État. Le pouvoir a été transmis au Conseil du commandement révolutionnaire pour le salut national (CCR-SN) sous la présidence d’Omar el-Bechir. En octobre 1993, il a été désigné président soudanais (et a été réélu en 1996, 2000, 2010 et 2015), et le CCR-SN a été dissous. En 1993, les États-Unis ont inclus le Soudan dans la liste des États sponsors du terrorisme, et en 1996, l’ONU a décrété des sanctions diplomatiques contre le Soudan (qui ont été en vigueur jusqu’en 2001).

En 2003, une guerre civile a commencé dans l’ouest du pays, dans la province du Darfour. La cause en revient à un accord conclu entre Khartoum et les rebelles du Sud sur le partage des revenus pétroliers qui ne prenait pas en compte les intérêts de la population du Darfour.

En 2005, le gouvernement d’el-Bechir et les rebelles du Sud ont signé, avec l’aide de l’ONU, un accord qui a mis fin à la guerre civile entamée en 1983 et ayant emporté 2 millions de vies. L’autonomie pour une durée de 6 ans a été accordée au Soudan du Sud. En 2011, le Soudan du Sud est devenu un État indépendant. Le territoire du Soudan s’est réduit de 2,5 millions à 1,9 millions de km2 et le pays a cessé d’être le plus grand sur le continent africain. La séparation du Sud riche en pétrole a porté un coup dur à l’économie soudanaise. En 2019, la dévaluation de la livre soudanaise, la hausse des prix du carburant et des principaux produits alimentaires ont fait sortir les gens dans la rue. Les manifestants demandaient la démission du président. Le 11 avril 2019, l’armée soudanaise, qui initialement soutenait le régime d’el-Bachir, a annoncé sa destitution et son arrestation. Il s’agissait du cinquième coup d’État depuis la proclamation de l’indépendance du pays en 1956.

Situation actuelle

Le pouvoir a été transmis au Conseil militaire de transition dirigé par le ministre de la Défense Awad Ibn Auf. Le lendemain, il a été remplacé par Abdel Fattah al-Burhan. Les autorités provisoires ont suspendu la Constitution de 2005, ont dissous le parlement et le gouvernement.

En avril 2019, le Conseil militaire et l’Alliance pour la liberté et le changement (ALC) de l’opposition ont entamé des pourparlers sur la future composition du pays et ont signé le 17 août la déclaration constitutionnelle. Le Conseil de souveraineté a été désigné principal organe du pouvoir d’État pour une période provisoire de trois ans et trois mois.

Les nouvelles autorités du Soudan ont signé un accord de paix avec des groupes rebelles agissant au Darfour et dans d’autres régions du pays. Un accord a été signé le 31 août 2020.

Le gouvernement provisoire a commencé à mener une politique visant à améliorer les relations avec les États-Unis et leurs alliés, notamment Israël. Quand le Soudan a annoncé la normalisation des relations avec Israël en octobre 2020, les États-Unis ont immédiatement exclu le Soudan de la liste des pays sponsors du terrorisme.

Le 25 octobre 2021 au Soudan, l’armée a arrêté un certain nombre de hauts responsables politiques et civils, le premier ministre Abdallah Hamdok étant assigné à résidence. Le président du Conseil souverain, Abdel Fattah al-Burhan, annonce la dissolution de l’institution et du gouvernement du pays, ainsi que la suspension de plusieurs articles de la déclaration constitutionnelle signée en 2019. Dans un discours adressé aux citoyens du Soudan, M. al-Burhan a promis d’organiser des élections législatives, d’établir un nouveau gouvernement indépendant et a tenu les forces politiques pour pleinement responsables de ce qui s’est passé dans le pays. Selon lui, les divisions entre les groupes politiques pour affirmer leur contrôle sur la transition « sont devenues une menace pour l’unité du pays ». Le 11 novembre, un nouveau Conseil souverain a été formé, toujours dirigé par Abdel Fattah al-Burhan. Le 21 novembre, un nouvel accord politique est conclu entre les forces militaires et civiles, aux termes duquel M. Hamdok redevient premier ministre. Ce document est censé faire partie de la déclaration constitutionnelle de 2019.

La situation au Soudan s’est aggravée en avril 2023 en raison de désaccords entre le président du Conseil souverain du pays et commandant de l’armée, Abdel Fattah al-Burhan, et le chef des Forces de soutien rapide (FSR), Mohammed Hamdan Dagalo. Les principaux points de désaccord entre eux portent sur le calendrier et les méthodes de formation d’une force armée unifiée, ainsi que sur la question de savoir si son commandant en chef doit être un militaire professionnel, comme le préconise al-Burhan, ou un président civil élu, comme le souhaite Dagalo. Le 15 avril 2023, des affrontements ont éclaté entre les FSR et l’armée à Merowe et à Khartoum, et se sont rapidement étendus à d’autres régions du Soudan. Le conflit a fait des milliers de morts et des dizaines de milliers de blessés. Les parties en conflit ont tenu une série de consultations à Djeddah en 2023.