Suite à la demande d’ouverture d’enquête contre Ursula von der Leyen faite par le GIPRI et le CJRF, nous avons contacté M. Alfred de Zayas et lui avons posé quelques questions auxquelles il a eu l’amabilité de répondre.
Multipolarra : Pouvez-vous vous présenter brièvement pour nos lecteurs ?
Je suis un juriste et historien de nationalité suisse et américaine, avec un doctorat en droit (Harvard) et un autre en histoire (Göttingen), ancien haut fonctionnaire du Bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, secrétaire du Comité des droits de l’homme, chef du département de requêtes, ancien expert indépendant des Nations Unies pour l’ordre international, Professeur de droit à la Geneva School of Diplomacy, avant cela Professeur invité à l’Institut universitaire de hautes études internationales, Université de British Columbia (Vancouver), DePaul University (Chicago), Universität Trier (Allemagne), Alcalá de Henares (Espagne), membre du conseil de l’Académie internationale de droit constitutionnel (Tunis).
Je suis l’auteur de 12 livres, notamment une trilogie des Droits de l’homme : Building a Just World Order (Clarity Press 2021), Countering Mainstream Narratives (2022), The Human Rights Industry (2023). Je suis également auteur sur Counterpunch (USA).
Multipolarra : À partir de quel moment vous êtes-vous penché sur l’éventuelle complicité de crimes de guerre et de génocide d’Ursula von der Leyen ?
La complicité des États-Unis et de l’Union européenne (UE) date de plusieurs décennies. La guerre n’a pas commencé en octobre 2023 mais déjà avec la Nakba de 1947-48, et il y a eu une épuration ethnique depuis 75 ans avec la complicité des États-Unis, du Canada, du Royaume-Uni et de plusieurs États européens y compris l’Allemagne. J’ai déjà écrit sur la complicité dans mes livres et articles juridiques, parce que ces pays occidentaux ont facilité les crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide par leur soutien à Israël – militaire, politique, économique, diplomatique et informatique. Le GIPRI a commencé à signaler le génocide depuis octobre 2023 et, en mars 2024, nous avons envoyé des lettres à Ursula von der Leyen, que j’ai ensuite fait publier chez Counterpunch. Cela est resté sans suite.
- https://www.counterpunch.org/2024/03/18/open-letter-to-the-eu-leadership-demanding-an-immediate-ceasefire-in-gaza/
- https://www.counterpunch.org/2024/03/25/follow-up-to-an-open-letter-demanding-accountability-from-the-eu-leadership-for-complicity-in-genocide/
De plus, nous avons adopté et diffusé un Manifeste en mars 2024.
Multipolarra : Quelles sont les chances que le Procureur de la CPI ouvre une enquête et que risquerait alors Ursula von der Leyen ?
Cela dépend des médias et du Zeitgeist. Cela dépend aussi de la perception du crime de complicité par les juges de la Cour. On ne peut pas ignorer la propagande occidentale qui définit la Commission européenne comme une organisation responsable et bénéfique. Il faut se tenir aux actions concrètes de la Commission européenne et pas aux « public relations » de l’UE et d’Ursula von der Leyen.
Du point de vue juridique, Karim Khan aurait dû – motu proprio – ouvrir une enquête sur la responsabilité de tous les États qui ont aidé Israël à commettre le génocide. La priorité et raison d’être de la Convention sur le génocide de 1948 n’est pas la punition des criminels – qui est toujours ex post facto – mais la PRÉVENTION du génocide. Pour cela, il faut interdire la vente des armes au pays coupables de crimes de guerre et de génocide. Il faut rompre les relations commerciales et diplomatiques avec l’État voyou. Il faut isoler ledit État. Mais l’UE et les États-Unis sont des négationnistes qui pratiquent l’apologie du crime de génocide et ont toutes sortes d’excuses pour les actions criminelles du gouvernement israélien.
Personnellement, j’espère quand même que Karim Khan se prononcera sur la question de la complicité. La Cour pénale internationale devra tôt ou tard examiner cette question, parce qu’il s’agit de la complicité des États selon l’art. III al. e de la Convention sur le génocide – États-Unis, Canada, Royaume-Uni, France, Allemagne, etc. Il s’agit de la complicité de l’UE, de Charles Michel, Josep Borrell, etc. Il s’agit de la responsabilité des médias qui ont disséminé des fake news et supprimé les opinions non conformes, et qui ont même incité à la haine contre tous les Palestiniens, ce qui comporte une violation de l’article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
UN Photo/Eskinder Debebe