Histoire du Royaume d’Eswatini (anciennement Swaziland)

Dossier TASS. Il y a 56 ans, le 6 septembre 1968, l’indépendance du Royaume d’Eswatini (ex-Swaziland) fut proclamée. TASS a compilé des informations sur l’histoire de ce pays enclavé situé en Afrique australe, limitrophe du Mozambique et de l’Afrique du Sud.

Royaume aux XVIIIe et XIXe siècles

Au XVIIIe siècle, le territoire de l’actuel Eswatini est peuplé par les Swazi qui parlaient une langue bantoue. Ainsi, le roi Ngwane III du clan Dlamini (issu du peuple nguni) réunit plusieurs tribus sous son autorité pour former un seul royaume.

Dans la première moitié du XIXe siècle, les Swazis résistent à l’expansion des colons européens – Portugais, Boers (descendants des colons hollandais en Afrique australe) et Britanniques, tout en menant des guerres sanglantes contre les Zoulous et d’autres tribus voisines. C’est ainsi que le roi Mswati II (qui régna de 1840 à 1865) doubla le territoire de ses dominations, et c’est d’ailleurs à lui que la nation et l’État doivent leur nom moderne (« bakaMswati » – « peuple Mswati » – dans la langue des colons européens transformé en « Swazi », et leur territoire a commencé à être appelé Swaziland – pays des Swazis).

En 1894, le territoire swazi est conquis par les Boers et incorporé à la République sud-africaine du Transvaal, recevant le statut de protectorat.

Colonie britannique

À l’issue de la guerre anglo-boer de 1899-1902, la République du Transvaal est annexée à l’Union d’Afrique du Sud (depuis 1961 – Afrique du Sud), sous contrôle britannique, et les terres du Protectorat du Swaziland sont morcelées. Sobhuza II, qui régna de 1921 à 1982, tenta de reprendre le contrôle du protectorat, mais à la fin des années 1960, il ne réussit à racheter aux Britanniques qu’environ la moitié des terres perdues.

À la fin des années 1920 et au début des années 1930, les premières organisations d’intellectuels africains commencent à émerger au Swaziland dans le but d’améliorer la situation de la population locale sous le régime colonial. En 1929, l’Association progressiste fut créée afin d’offrir aux Swazis de meilleures opportunités dans les domaines de l’éducation, du commerce et des activités sociales. En 1934, le premier journal en langue siswati (ou swasi) fut lancé. Dans les années 1960, plusieurs partis se formèrent en faveur de l’indépendance et d’un développement économique accéléré, dont, par exemple, le mouvement anti-colonial le Congrès national de libération ngwane (NNLC) et le Mouvement national Imbokodwo (INM), celui-ci à l’initiative de Sobhuza II.

Indépendance

L’indépendance du Royaume du Swaziland fut proclamée le 6 septembre 1968. Le Congrès national de libération Ngwane ayant remporté 20% des voix aux élections de 1972, Sobhuza II abrogea la Constitution, dissous le parlement et interdit les partis politiques. Pendant plusieurs années, il dirigea le pays par décrets directs, ne prenant conseil qu’auprès du conseil traditionnel des monarques swazis. La Constitution adoptée en 1978 rétablit toutefois le parlement, mais les élections devinrent non partisanes, et l’essentiel du pouvoir se concentra entre les mains du monarque.

Après la mort de Sobhuza II en 1982, une guerre de succession familiale éclate. Le pays est dirigé pendant quatre ans par régence. En 1986, son fils Mahosetiwe monte sur le trône, prenant le nom de Mswati III après son intronisation. Malgré le mécontentement de la partie démocratique de la société, il continue à régner en tant que monarque absolu. Entre 1988 et 1989, Mswati III doit faire face à la résurgence de partis interdits, opérant par l’intermédiaire d’organisations syndicales et étudiantes et exigeant la démocratisation de la société.

Les manifestations et les grèves constituent la principale forme de protestation à l’époque. La lutte est menée par le Mouvement démocratique uni du peuple (Pudema). Sous cette pression, Mswati III est contraint de mettre en place une commission spéciale chargée de réviser la Constitution. Celle-ci rédigea plusieurs versions de la loi fondamentale, mais malgré les protestations des syndicats et des organisations de la société civile, la Constitution promulguée par le monarque en février 2006 ne limitait pas le pouvoir du souverain et ne levait pas l’interdiction des partis.

Les manifestations antigouvernementales réclamant la démocratisation du régime et la légalisation des partis restent un élément important de la vie politique du pays. Face aux manifestations de 2008, le roi initie l’adoption de la loi « sur la suppression du terrorisme », activement utilisée ensuite par les autorités pour combattre les opposants. La situation est réglée grâce à la médiation de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), mais au moins 27 personnes périssent dans les émeutes, selon les chiffres officiels.

Situation moderne

Le 19 avril 2018, à l’occasion du 50e anniversaire de l’indépendance, le roi Mswati III annonce le changement du nom officiel du pays, passant de « Royaume du Swaziland » à « Royaume d’Eswatini » (« le pays des Swazis » en langue swati). Cette décision a pour but de dissocier du passé colonial et d’éviter que l’État africain ne soit confondu avec la Suisse.

Aujourd’hui, l’Eswatini est une monarchie constitutionnelle, avec la ville de Mbabane comme capitale. Les langues officielles sont l’anglais et le siswati. La majorité de la population, qui se chiffre au total à 1,2 million d’habitants, appartient au groupe ethnique swazi et parlent bantou.

Sous le règne de Mswati III, le PIB du pays est passé de 450 millions de dollars en 1986 à 4,6 milliards de dollars en 2023 (selon les chiffres de la Banque mondiale), avec des taux de croissance économique souvent supérieurs à la moyenne du continent (7,9% contre 4,1% en 2021). L’inflation à la fin de l’année dernière était de 3,2%, et le chômage touchait au moins un quart des citoyens valides. Jusqu’à 60% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (avec moins de 3,65 dollars par jour). L’agriculture, le principal secteur de l’économie, emploie plus de 80% de la population. Les principales exportations du royaume sont le sucre, les agrumes, les concentrés de boissons gazeuses et le bois. Les principaux partenaires commerciaux de l’Eswatini sont l’Afrique du Sud, les pays de l’UE, les États-Unis, le Mozambique, la Namibie et le Botswana.