STOCKHOLM, 11 mars. /TASS/. L’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri) a publié son nouveau rapport sur les transferts internationaux d’armes en 2019-2023. Les pays européens ont presque doublé leurs importations d’armes par rapport à 2014-2018 (+94%), tandis que les exportations vers l’Asie et l’Océanie, où se trouvent les dix plus grands importateurs du monde, ont affiché une forte hausse.
Alors qu’en 2019-2013 les États-Unis ont augmenté de 17% leurs exportations par rapport à 2014-2018, la Russie a vu ses exportations se réduire de moitié. C’est la première fois que la Russie est le troisième plus grand exportateurs du monde dans le classement du Sipri derrière la France. Le volume mondial des transferts internationaux d’armes a légèrement diminué de 3,3% pendant cette période.
Exportations russes
Les exportations d’armes russes ont diminué de 53% par rapport à 2014-2018, s’élevant à 11% du volume mondial, affirme le Sipri. Cette baisse a été la plus rapide pendant les cinq dernières années: si en 2019, la Russie a vendu ses armes majeures dans 31 pays, leur nombre s’élevait à 14 en 2022, et à 12en 2023.
68% des exportations ont été effectuées vers l’Asie et l’Océanie avec l’Inde (34%), la Chine (21%) et l’Égypte (7,5%). La part des pays du Moyen-Orient s’est élevée à 13%, et celle des pays d’Afrique à 10%. Les exportations vers l’Inde ont reculé de 34%, de 39% vers la Chine et de 54% vers l’Égypte. En 2014-2018, l’Algérie et le Vietnam étaient respectivement le quatrième et le cinquième importateur d’armements russes, mais par la suite, les quantités importées par ces deux pays ont diminué de 83% et 91%.
Selon le rapport, le carnet de commandes restreint pour les principaux armements russes laisserait le volume des exportations russes au-dessous du niveau de 2014-2018, à tout le moins dans un futur proche. En 2019, les exportations russes étaient à la même hauteur que les 20 années précédents, tandis qu’en 2020, 2021 et 2022, elles ont connu une forte baisse et en 2023, elles ont chuté de 52% par rapport à l’année précédente.
Europe
55% des importations d’armements par les pays européens ont constitué les livraisons depuis les États-Unis en 2019-2023, soit 35% de plus que pendant la période précédente.
« Plus de la moitié des importations d’armes des États européens proviennent des États-Unis, indique le directeur du Sipri, Dan Smith. Alors que dans le même temps, l’Europe est à l’origine d’environ un tiers des exportations mondiales d’armes, dont d’importantes quantités sont issues de la région, ce qui reflète la forte capacité militaro-industrielle de l’Europe. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les États européens membres de l’Otan importent des armes en provenance des États-Unis, notamment l’objectif de maintenir des relations transatlantiques, ainsi que des questions plus techniques, militaires et liées aux coûts. Si les relations transatlantiques venaient à changer dans les années à venir, les politiques d’acquisition d’armes des États européens pourraient également changer. »
Les pays européens ont augmenté leurs importations d’armes de 94%, ce qui s’explique par les livraisons en Ukraine qui est le premier importateur européen et le quatrième mondial. Depuis février 2022, 30 pays ont transféré des armes à Kiev
55% des importations européennes en 2019-2023 étaient constituées d’armements américains. Pendant les cinq années suivantes, leur part était de 35%. Les parts de deux autres fournisseurs d’armes en Europe, à savoir l’Allemagne et la France, sont respectivement de 6,4% et 4,6%.
« Avec de nombreuses commandes d’armes très coûteuses – dont près de 800 avions et hélicoptères de combat – les importations européennes d’armes resteront probablement à un niveau élevé, écrit le chercheur principal du Sipri, Pieter Wezeman. Au cours des deux dernières années, nous avons également constaté une demande beaucoup plus forte en systèmes de défense aérienne en Europe, stimulée par la campagne de missiles russes contre l’Ukraine. »
États-Unis et France
La part des exportations militaires américaines, qui ont connu une croissance de 17% en 2019-2023 par rapport à 2014-2018, a augmenté de 34% à 42% en termes mondiaux. En 2019-2023, les États-Unis ont livré leurs armements majeurs dans 107 pays du monde. Les États-Unis et l’Europe ont assuré 72% des exportations mondiales, tandis qu’en 2014-2018, leur part était à hauteur de 62%.
« Les États-Unis ont accru leur rôle de fournisseur mondial d’armes – aspect important de leur politique étrangère – en exportant plus d’armes vers plus de pays qu’ils ne l’ont jamais fait par le passé, souligne le directeur du programme Transferts d’armes du Sipri, Mathew George. Cela se produit à un moment où la domination économique et géopolitique des États-Unis est remise en cause par les puissances émergentes. »
La France a accru de 47% ses exportations militaires en 2019-2023 par rapport à 2014-2018, ce qui lui a permis de se classer deuxième exportateur mondial, une première. Paris a exporté principalement vers l’Asie et l’Océanie (42%) et vers le Moyen-Orient (34%). L’Inde était le premier importateur d’armements français avec 30% du volume total. Les livraisons d’avions militaires vers l’Inde, le Qatar et l’Égypte expliquent essentiellement cette hausse.
« La France profite de la forte demande mondiale pour dynamiser son industrie d’armement par le biais des exportations, précise la chercheuse au Sipri, Katarina Djokic. La France a particulièrement réussi à vendre ses avions de combat hors d’Europe. »
Autres fournisseurs
Quant aux autres grands fournisseurs d’armes, deux d’entre eux, à savoir l’Italie et la Corée du Sud, ont augmenté leurs exportations de respectivement 86% et 12%, et cinq d’entre eux ont connu une baisse: le Royaume-Uni (-14%), l’Allemagne (-14%), Israël (-25%), l’Espagne (-3,3%) et la Chine (-5,3%).
Les pays d’Asie et d’Océanie ont été les principaux acheteurs d’armes majeures vendus en 2019-2023 (37%). Pour la première fois en 25 ans, les États-Unis étaient le plus gros fournisseur d’armes vers cette région (34%). Les parts de la Russie et de la Chine se sont élevées respectivement à 19% et 13%.
Importateurs
L’Inde est restée le premier importateur d’armes dans le monde (+4,7% en 2019-2023 par rapport à 2014-2018). Même si la Russie est toujours le premier fournisseur de New Delhi (36%), c’est pour la première fois depuis 1964 que les armements russes ont constitué moins de la moitié des quantités importées.
Le Pakistan a augmenté ses importations militaires de 43% pour ainsi devenir cinquième dans le classement mondial en 2019-2023. Avec sa part à hauteur de 82%, la Chine est son premier fournisseur d’armes. Le Japon a augmenté ses importations d’armes de 155% et la Corée du Sud de 6,5%. Les importations de la Chine ont diminué de 44%, ce qui est dû essentiellement au passage de systèmes d’armements étrangers, principalement russes, aux nationaux.
« Il ne fait aucun doute que les niveaux élevés et soutenus d’importations d’armes par le Japon et d’autres alliés et partenaires des États-Unis en Asie et en Océanie sont largement motivés par un facteur clé: l’inquiétude quant aux ambitions de la Chine, souligne Siemon Wezeman. Les États-Unis, qui partagent leur perception d’une menace chinoise, sont un fournisseur dominant de la région. »
En 2019-2023, les pays du Moyen-Orient ont importé un tiers du volume mondiale. Trois pays de la région – l’Arabie saoudite, le Qatar et l’Égypte – ont fait partie des dix premiers importateurs mondiaux. La plupart des livraisons (52%) a été assurée par les entreprises américaines. La France (12%) est deuxième suivie de l’Italie (10%) et l’Allemagne (7,1%).
« Malgré une baisse globale des importations d’armes au Moyen-Orient, celles-ci restent élevées dans certains États touchés en grande partie par des conflits et des tensions régionaux, précise le chercheur au Sipri, Zain Hussain. Des armes majeures importées au cours des dix dernières années ont largement été utilisées dans les conflits de la région, notamment à Gaza, au Liban et au Yémen. Certains États de la région du Golfe ont importé de grandes quantités d’armes pour contrer les Houthis au Yémen et l’influence iranienne. »