NICOSIE, 23 août. /TASS/. Le dirigeant chypriote turc Ersin Tatar a déclaré avoir reçu un appel des Nations unies l’invitant à participer aux pourparlers sur le dossier chypriote dès le mois de septembre. Le journal Cyprus Mail rapporte que M. Tatar a fait part de cet appel au public turc lors de son intervention à un événement à Bartin, près de la côte turque de la mer Noire, tout en s’engageant à respecter strictement les principes qu’il a précédemment énoncés.
Selon le chef de la communauté chypriote turque et président de la République turque de Chypre du Nord (RTCN) autoproclamée, l’ONU nourrit de grands espoirs quant aux perspectives de reprise du dialogue intercommunautaire. Toutefois, M. Tatar a déclaré qu’il ne reculerait pas d’un pouce sur sa condition préalable concernant la nécessité de « réaffirmer l’égalité souveraine et le statut d’État » de la partie nord de Chypre. « Nous attendons donc cela dès maintenant. Seulement si cette confirmation se concrétise en commerce direct, vols directs, contacts directs avec la levée immédiate de toutes sortes d’embargos impitoyables, nous pourrons procéder à une solution juste, à long terme et durable au problème chypriote », a déclaré le dirigeant chypriote turc cité par le quotidien.
M. Tatar a ajouté que sans confirmation des conditions susmentionnées, les dirigeants chypriotes turcs ne reviendront pas à la table des négociations, même si la partie chypriote grecque insiste sur la nécessité de poursuivre le dialogue intercommunautaire à partir du moment où il a été interrompu en 2017 à Crans-Montana, en Suisse, lorsque l’idée de résoudre le problème chypriote sur une base fédérale a été discutée avec des propositions de retrait des troupes étrangères de l’île et d’abolition des garanties de sécurité externes pour Chypre.
Lors de son discours à Bartin, M. Tatar a continué à insister sur le fait qu’il existe deux États distincts et deux peuples différents à Chypre. Il a souligné que son camp continuait à participer au processus diplomatique en vue d’un règlement de la question chypriote, même en dehors des réunions en face à face avec les autres participants au processus. « Nous exigeons que notre souveraineté soit reconnue avant de nous asseoir à la table des négociations. C’est notre droit le plus naturel », a souligné le dirigeant chypriote turc.
Dans quelle mesure les perspectives de reprise du dialogue sont-elles réalistes?
Le 3 août, lors d’une rencontre avec des réfugiés chypriotes grecs de Famagouste, le dirigeant chypriote grec et président de la république de Chypre, Nikos Christodoulidis, a déclaré que le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres avait invité les dirigeants des deux communautés de l’île à une réunion tripartite qui se tiendrait le 13 août à New York. M. Christodoulidis a ajouté que, pour sa part, il avait accepté l’invitation. Cependant, M. Tatar a ensuite tenté de désavouer ses affirmations, déclarant qu’aucune invitation du secrétaire général des Nations unies n’avait été reçue par les parties et qu’ »il n’y a pas de terrain d’entente pour la reprise des négociations sur le problème chypriote », et qu’il n’était donc pas nécessaire d’organiser une réunion tripartite ou dans un tout autre format.
La déclaration actuelle du dirigeant chypriote turc selon laquelle l’appel de l’ONU a bien eu lieu pourrait toutefois signifier que M. Guterres n’abandonne pas l’idée d’une réunion conjointe avec les deux hommes. Celle-ci pourrait bien être organisée en marge de la 79e session de l’Assemblée générale des Nations unies à New York en septembre, à laquelle M. Christodoulidis assistera.
Chypre est divisée depuis l’invasion armée turque de 1974, provoquée par un coup d’État des partisans de l’annexion de l’île à la Grèce. À l’issue de la guerre, environ 37% du territoire chypriote est passé sous contrôle turc. La RTCN a été créée en 1983 et n’est reconnue internationalement que par Ankara. La partie sud de l’île est restée sous le contrôle de la république de Chypre, peuplée majoritairement de Chypriotes grecs.
Aujourd’hui, les deux parties ont des visions très différentes de la manière de résoudre le problème chypriote. Les dirigeants chypriotes grecs acceptent l’unification de l’île uniquement sur le fondement des résolutions en vigueur du Conseil de sécurité des Nations unies stipulant qu’une fédération bicommunautaire et bizonale avec une « égalité politique » des parties devrait être établie à Chypre. Dans le même temps, les autorités chypriotes turques actuelles font de la reconnaissance de l’ »égalité souveraine » des Chypriotes turcs et de l’ »égalité de statut international » de leur communauté avec celle chypriote grecque, qui est plus importante, une condition du règlement.
UN Photo/Eskinder Debebe